S.l. (Triembach-au-Val), s.e., 1943-1944 ; 22 photographies de 17,5 x 10,5 cm présentées sur un panneau de 63 x 74 cm, sous vitre et encadrement.
La seconde guerre mondiale a très durement éprouvé la famille Kuhn-Dollé, habitant alors à Sélestat. Des cinq enfants du couple, les trois les plus âgés furent confrontés à l'incorporation de force. L'aîné de la fratrie, Joseph, ayant échoué dans sa tentative de rejoindre la France non occupée, se cacha pendant plus de deux ans dans la cave de ses tantes et oncle, à Triembach-au-Val. Passionné de photographie, Joseph Kuhn possédait un Deckel-München 1933, et développait lui-même ses clichés. Les 22 photographies originales que nous présentons ont été prises par Joseph Kuhn lui-même, au cours de cette période d'enfermement, et sont présentées sur un panneau légendé retraçant les 25 mois de son calvaire. On y découvre le jeune homme (né en 1922), la barbe et les cheveux de plus en plus longs, l'allure christique, se mettant en scène, seul ou accompagné de membres de sa famille. On le voit ainsi en train de fabriquer du fromage ; à l'écoute de Radio-Londres avec ses tantes ; fermant la trappe menant à sa cachette ; jouant aux cartes ; arborant croix de Lorraine et "V" de la victoire dessinés sur son torse, poignard à la main ; posant en compagnie de sa mère, de ses tantes ou de ses frères - incroyable image que celle de Joseph au côté de René Kuhn, son frère, en uniforme allemand, lacérant un drapeau nazi (son frère, alors en permission, avait été incorporé de force ; il fut tué sur le front en Lettonie en 1944), etc. Les trois derniers clichés montrent Joseph rasé, travesti en femme, s'apprêtant à rejoindre les troupes américaines. La Gestapo a plusieurs fois perquisitionné la maison dans laquelle Joseph Kuhn était caché, sans rien trouver. Il faut souligner le courage de Joseph et de sa famille qui, à leur manière, résistèrent à l'envahisseur nazi ; si un seul de ces clichés avait été trouvé, le sort de toute la famille était scellé. L'histoire de ces photographies et de Joseph Khun est connue grâce au travail de son frère Tharsice (que l'on voit sur l'une des photographies). Membre actif de l'Association des Amis du Mémorial d'Alsace-Lorraine, il a œuvré pour la reconnaissance de la mémoire de ses deux frères, mais aussi des "Malgré-nous" en général. Tharsice Kuhn a remis au Musée de l'Armée à Paris sa collection de 33 clichés pris par son frère Joseph. Ce dernier, affaibli par 25 mois d'enfermement dans un environnement humide, sans air et lumière, mourut en 1947. Document exceptionnel.
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